Magalie Marais, Montpellier Business School; Marija Roglic, Montpellier Business School et Maryline Meyer, Montpellier Business School

La pandémie de Covid-19 mais aussi les transformations sociétales à l’œuvre autour de la question du changement climatique interrogent notre rapport au monde et les choix de société associés. Notamment, devient fondamentale la question de penser nos activités humaines – et donc le management – autour d’une éthique du « tenable », c’est-à-dire une éthique considérant tout ce que nous faisons pour maintenir, perpétuer et réparer notre « monde », de sorte que nous puissions y vivre aussi bien que possible.

Cet appel à une éthique du « care », notamment en management, répond à la critique d’un fonctionnement des organisations ne considérant pas suffisamment « l’humain » et le vivant, avec pour conséquences des formes de dominations concomitantes au système capitaliste et à l’idéologie de la croissance infinie. La notion de « limites », comprises dans une approche critique, est alors essentielle pour repenser le travail, notre rapport à la nature et fournir les bases d’une véritable émancipation individuelle et collective. Et ceci dans un contexte où la sixième limite planétaire, celle du cycle de l’eau douce, vient d’être franchie.

Un certain type de bienveillance se nourrit des échanges informels entre collègues qui peuvent par exemple avoir lieu autour de la machine à café. Pxhere, CC BY-SA

Guillaume Mercier, IÉSEG School of Management et Ghislain Deslandes, ESCP Business School

Si les phénomènes de désenchantement et de désengagement des salariés au travail ne sont pas nouveaux, la crise du coronavirus pose cependant de manière ardente la question du sens du travail et de la place des relations interpersonnelles en entreprise. L’obligation actuelle d’adapter les modalités de travail (télétravail, visioconférences, etc.) amène une redéfinition des relations interpersonnelles, réduites, virtualisées, instrumentalisées, amputées notamment de leur dimension conviviale et informelle.

À terme, reconstruire ces relations interpersonnelles ne sera pas chose aisée et nécessitera de repenser en profondeur les modes de management. Nous proposons que la vertu de bienveillance – dont la mode actuelle déforme parfois le sens et manque la perspective proprement éthique – aura un rôle à jouer dans ce renouvellement.

Mais qu’est-ce tout d’abord que la bienveillance ? Elle est cette disposition qui consiste à vouloir le bien de l’autre, à se tourner résolument vers autrui, à se mettre à son écoute, en quelque sorte à le servir. C’est un exercice exigeant d’attention, dont la philosophe Simone Weil disait qu’elle est « la forme la plus rare et la plus pure de la générosité ».

Avant le premier confinement de mars 2020, seulement 19 % de l’ensemble des répondants avaient l’habitude de faire du télétravail. Shutterstock

Ingrid Nappi, ESSEC et Gisele de Campos Ribeiro, ESSEC

De façon générale, l’intensification du télétravail depuis le mois de mars 2020 semble avoir été bien vécue par la majorité des salariés, au point que certaines entreprises envisagent de conserver à l’avenir une partie de leurs salariés à la maison afin de réduire leurs coûts immobiliers, voire certaines à devenir complètement virtuelles. Toutefois, cette décision ne serait pas sans conséquence, et l’on peut se demander à quoi ressemblera le futur du bureau dans un monde post-Covid-19.

Pour tenter d’esquisser une réponse, la Chaire Workplace Management de l’ESSEC Business School, a mené une étude qui évalue d’ores et déjà l’impact de la crise sanitaire et de l’expérience du télétravail sur les attentes de 2 643 employés de bureau par rapport à leur espace de travail.

En voici les principaux enseignements.

Les partenaires sociaux ont signé fin novembre un projet d’accord qui met l’accent sur les risques pour le télétravailleur, comme l’isolement ou la perte de lien social. Goffkein.pro / Shutterstock

Caroline Diard, ICN Business School

Après quelques semaines seulement de négociation, les partenaires sociaux ont abouti, le 26 novembre 2020, à la conclusion d’un nouveau projet d’Accord national interprofessionnel (ANI) « pour une mise en œuvre réussie du télétravail ».

Ce projet de texte, déclenché par l’essor du télétravail lié à la pandémie mondiale de Covid-19, se distingue des précédents accords sur le sujet (ANI de 2005 et ANI « encadrement » de février 2020) par l’accent mis sur les risques pour le télétravailleur : isolement, perte de lien social, charge de travail, hyperconnectivité, etc. Il s’agit là de préserver la relation de travail en insistant sur la prévention du risque d’isolement des télétravailleurs.

 

Autre élément notable, l’ANI s’intéresse à la relation managériale : formation, accompagnement et développement des compétences, etc. Le manager joue en effet un rôle essentiel dans la mise en œuvre opérationnelle du télétravail. C’est pourquoi le texte insiste sur la nécessité d’assurer la montée en compétences des salariés comme des managers face aux évolutions engendrées par le télétravail.